Le Reggae

LE REGGAE

La présence de troupes américaines à la Jamaïque pendant et après la Seconde Guerre Mondiale a laissé des traces sur la population locale. Des big bands de jazz se forment alors, précédant un fort engouement pour le rhythm’n’blues, qui durera jusqu’à l’indépendance de l’île en 1962. A cette date, un nouveau genre musical basé sur le contretemps voit le jour : le ska, dont le tube « My Boy Lollipop » chanté par la très jeune Millie demeure l’illustration la plus célèbre. De déformations en assouplissements, le genre se métamorphose en reggae ; un terme que l’on doit à Frederic « Toots » Hibbert, compositeur en 1967 de « Do The Reggay » (le mot étant lui-même une synthèse de « regular » et « guy » et pour d’autres de « streggae » ou de « regge regge » signifiant « violent » et « querelle » en patois local).

ECLOSION DU REGGAE

Musicalement, le reggae reprend au ska son invention des figures rythmiques du rhythm’n’blues, mais sur un tempo plus lent et des structures rythmiques plus élaborées : la guitare marque tous les contretemps par une croche ou deux doubles croches. Musique du ghetto, liée à la culture « rasta » (éloge de la vie naturelle de la marijuana, de l’homme noir et de la culture noire issue d’Ethiopie), le reggae ne franchit les frontières jamaïquaines qu’en 1968 avec « Israelites« , une chanson de Desmond Dekker. Il faudra attendre 1973 et la reprise par Eric Clapton du titre de Bob Marley « I Shot The Sheriff » pour que le public international et blanc se familiarise enfin avec son rythme chaloupé.

Israelites, Desmond Decker

L’ASCENSION DE BOB MARLEY ET DE JIMMY CLIFF

Bob Marley et Jimmy Cliff, héros de The Harder They Come, film jamaïquain de référence signé Perry Henzel en 1972, imposent définitivement le reggae tout autour de la planète. Une pléiade d’artistes et de groupes (Dennis Brown, Jacob Miller, Junior Murvin, Pablo Moses, Peter Tosh, Burning Spear…) s’engouffre dans la brèche, souvent grâce au producteur jamaïquain blanc fondateur du label Island, Chris Blackwell. A la fin des années 70, Bob Marley est une star internationale, la première issue du tiers-monde.

Reggae night, Jimmy Cliff

En Grande-Bretagne, la communauté immigrée s’identifie à cette musique qui se veut l’incarnation des cris de colère et de révolte des peuples opprimés de la planète. Elle fait entendre sa voix par l’intermédiaire de ses représentants Steel Pulse, Aswad ou encore le poète militant aux allures de Malcom X : Linton Kwesi Johnson. Parallèlement, de nombreux groupes anglais, punk en tête, vont chercher et trouver leur inspiration dans le reggae : ainsi The Clash, The Police, Ruts et même The Rolling Stones.

No woman no cry, Bob Marley

LES SUCCESSEURS

En Jamaïque même, une nouvelle génération prend son envol, à l’image de l’époustouflant trio Black Uhuru, emmené par une brillante section rythmique de l’île : le batteur Sly Dunbar et le bassiste Robbie Shakespeare. On retrouvera d’ailleurs ces deux musiciens derrière Serge Gainsbourg lorsque le compositeur français succombera à son tour aux charmes du reggae sur « Aux Armes Et Cetera« . A la même époque, Bernard Lavilliers produira également quelques titres dans l’esprit « Reggae ».

Quand Bob Marley disparaît en 1981, il s’avère bien difficile de lui trouver un successeur. Privé de sa locomotive, le reggae connaît une baisse de popularité malgré l’éclosion de deux nouvelles stars en Afrique ; terre promise des rastas : l’Ivoirien Alpha Blondy et le Sud-Africain Lucky Dube. Le rap devient peu à peu le champ d’expression privilégié du message radicalisé de la nation noire. Il faudra attendre le début des années 90 pour voir émerger une nouvelle scène jamaïquaine autour de son rap à elle, le ragga, dont Shabba Ranks, Buju Banton et Chaka Demus & Piers s’affirment les figures de proue.

Alpha Blondie

Sarah Aït-Ameur

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